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Prescription et assurance-vie

Par Maître ANTEBI - Avocat à Cannes, Nice, Grasse, Antibes

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La prescription et l’assurance-vie

L’assurance-vie est un produit intéressant et assez sûr.

Il consiste pour un souscripteur à souscrire une assurance sur la vie. Au prédécès du souscripteur, le capital garanti est attribué au(x) bénéficiaire(s) désigné(s). Les droits fiscaux sont allégés par rapport aux droits de succession.

En cette espèce, la cour de cassation a cassé un arrêt d’appel (civ 1ère, 24 mai 2018, pourvoi n° 17-18.270, Légifrance) qui a dit à tort qu’une action en rapport de primes manifestement excessives exercée au-delà du délai de droit commun de cinq ans à compter de la connaissance du fait litigieux était prescrite.

Simone est décédée, laissant pour lui succéder ses quatre enfants. L’un d’eux, Pierre, a assigné ses sœurs en partage judiciaire sur le fondement de l’article 815 du Code civil.

A cet égard, il demandait le rapport des primes manifestement excessives, dans la mesure où il avait été évincé de l’assurance-vie.

La cour d’appel a jugé que ses demandes étaient irrecevables car la succession avait déjà fait l’objet d’un partage successoral et que le demandeur avait déjà encaissé sa part successorale depuis 2008, soit plus de cinq années lorsqu’il a assigné ses sœurs en octobre 2013.

La cour d’appel a appliqué à la lettre l’article 2224 du Code civil, prescription de droit commun (« les actions personnelles et mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer »).

Le notaire avait établi un projet de déclaration de succession en 2008 et par lettre de 2008, Pierre avait écrit audit notaire reprochant à ses sœurs d’avoir été évincé inéquitablement de l’assurance-vie souscrite par leur mère. Cette lettre de Pierre constituait la preuve de la connaissance du fait litigieux, point de départ de la prescription pur exercer l’action en justice.

Courant 2008, le notaire a répondu à Pierre en lui écrivant qu’il pouvait diriger une action judiciaire contre ses sœurs en rapport de primes d’assurance-vie, en suite de quoi, Pierre a décidé d’encaisser sa part successorale, sans prendre en compte les primes.

Pierre a décidé de porter son affaire devant la Cour de cassation ; il expliquait que la cour d’appel avait mal jugé car en réalité, la succession n’avait pas été entièrement partagée. Les meubles meublants et les objets qui ornaient la maison de sa mère (part importante de l’actif successoral) n’avaient pas encore été partagés de sorte qu’il demeurait encore une Indivision successorale à liquider et à partager.

Or, en demandant le rapport des primes après le partage partiellement effectué, la cour de cassation a assimilé cette action à une demande de partage complémentaire.

Dans un attendu : « qu’en se déterminant ainsi sans vérifier si faute d’inclure les meubles meublants et les objets garnissant l’habitation de al défunte, le partage effectué par le notaire n’avait été que partiel, de sorte qu’une partie de la masse successorale restait indivise, ce qui justifie un partage complémentaire, qui est imprescriptible, la cour d’appel a privé sa décision de base légale ».

Au vu de ce qui précède, on dira que le droit des successions est pétri de nombreux délais de prescription spécifiquement prescrits par les textes. A défaut, on applique le délai de droit commun de l’article 2224 du Code civil lequel démarre à compter de la connaissance du fait permettant d’exercer un droit.

L’assurance-vie est hors succession, mais il n’en est pas de même s’agissant du rapport des primes manifestement excessives. De sorte que l’action en rapport successoral peut être intentée au-delà de cinq ans à compter de la connaissance des assurances-vie et des clauses bénéficiaires litigieuses si le partage n’est pas encore intervenu ou si ce partage n’est survenu que partiellement car l’action en partage (initiale ou complémentaire) et donc en rapport successoral, est imprescriptible.

Publié le 20 janvier 2022

Me Ronit ANTEBI Avocate en droit des successions à Cannes

NOTE : Les articles élaborés par Me Ronit ANTEBI s'appuyant sur la jurisprudence et les textes en vigueur sont à jour à la date de leur rédaction. Ils ne s'auto-actualisent pas. Afin de tenir compte des évolutions législatives et jurisprudentielles, l'internaute est invité à toujours rechercher l'actualisation par tous moyens. Il n'est pas dispensé de solliciter une consultation juridique auprès d'un professionnel du droit.

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